Un jour, une femme : Emilie Llorens, entre logistique et questions environnementales et sociétales

A l’occasion de la Journée Mondiale des droits des femmes, nous avons souhaité cette semaine mettre en lumière quelques-uns des talents féminins présents au cœur de l’écurie française Orient Express Racing Team.
Aujourd’hui, la Normande Emilie Llorens. Responsable de la RSE à son arrivée, elle a pris des responsabilités supplémentaires il y a quelques mois et occupe désormais une fonction « Operations & Sustainability » plus transversale.
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RENCONTRE
Quelle est votre mission au sein de l’écurie Orient Express Racing Team ?
Mon rôle est multiple : je travaille au sein du département Opérations sur divers projets et sur la logistique de l’équipe Orient Express Racing Team. Je soutiens également l’équipe dans sa stratégie et ses projets de développement durable qui visent à réduire notre impact sur l’environnement et à accroître l’inclusion dans le monde de la voile.
D’où vient votre passion pour la mer ?
Je viens d’une famille d’amoureux de l’océan, mes parents faisaient de la plongée sous-marine et m’ont emmené avec eux dès mon plus jeune âge.
Quel message souhaitez-vous faire passer à l’occasion de la Journée internationale de la femme ? Et en particulier pour les jeunes femmes ?
Nous travaillons à accroître la diversité et l’inclusivité au sein de l’industrie afin de créer des conditions équitables où le sexe ne détermine pas les possibilités d’emploi. Osez franchir les portes, formez-vous à tous types de métiers, ne vous mettez pas de limites.
Les principaux enjeux d’une plus grande parité entre les hommes et les femmes sur votre lieu de travail ?
Dans l’univers de la compétition nautique, nous avons pas mal de métiers techniques. Si nous voulons davantage de femmes dans nos équipes, il faut commencer par en avoir dans, les écoles d’ingénieurs, les BTS etc… L’enjeu est là : la formation. Faire la promotion de nos métiers bien amont.
Ta vision de la femme dans le monde et dans le sport ?
Je trouve que les choses bougent mais pas assez vite. Je me suis mise au fait des sujets féministes au cours des dernières années. Il y a encore d’énormes problèmes mais je trouve ça hyper intéressant d’essayer de travailler dessus et que des gens s’emparent de ces sujets-là. La voile s’ouvre même s’il y a toujours plus d’hommes que de femmes au sein des teams. Souvent, il faut être performant rapidement car les campagnes sont courtes donc les équipes se tournent vers des gens avec qui ils ont déjà travaillé. On est dans un milieu restreint. Cette culture de la performance peut aider les femmes mais ça réduit les opportunités pour ceux qui ne sont pas dans le milieu. Il y a beaucoup de choses qui sont faites, notamment sur SailGP et sur la Coupe, mais il faudrait que ça soit plus naturel partout, qu’avoir une compétition féminine soit une évidence quand il y a une compétition masculine.
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PORTRAIT
Forte d’expériences aussi nombreuses que variées dans le milieu de la voile, Émilie Llorens officie au sein d’Orient Express Racing Team.
Responsable de la RSE à son arrivée au sein du Challenger français, elle a pris des responsabilités supplémentaires il y quelques mois et occupe désormais une fonction « Operations & Sustainability » plus transversale.
Émilie Llorens grandit en Normandie, à Fécamp plus précisément, dans une famille passionnée de sports nautiques. Fans de plongée sous-marine, ses parents pratiquent aussi la voile en croisière l’été, avec des amis. Si elle fait quelques stages de voile, elle ne débute la compétition qu’à l’âge de 15 ans sur le Trophée des Lycées, en First Class 8. Piquée par le virus de la compétition, elle s’inscrit en école de sport. Entraînements le mercredi, régates le week-end : Émilie navigue beaucoup en habitable, notamment en Open 5.7, et passe le plus de temps possible sur l’eau en marge de ses études. Après deux ans de classes préparatoires à Rouen, elle entre à l’ESC Brest, une école qu’elle choisit « car ils faisaient le Tour Voile ». Lors de sa dernière année d’études, elle fait son alternance à Lorient, chez Air Liquide, et continue de naviguer à côté. Sur place, elle rencontre plusieurs personnes qui travaillent pour le Groupama Team France. Le déclic se fait dans sa tête : son avenir professionnel s’écrira dans la voile. « Je ne savais pas ce que je voulais faire quand je suis entrée en école de commerce. La voile a toujours été ma passion. En rencontrant des personnes dont c’était le métier, je me suis dit que je voulais faire pareil. J’avais déjà des contacts dans la voile car je faisais du bateau, mais il me fallait une légitimité », précise Émilie, qui décide alors de faire un Master spécialisé dans le management des organisations sportives à KEDGE Marseille. Dans ce cadre, elle fait un stage au Yachting Club de la Pointe Rouge (YCPR), où elle organise les Championnats du Monde de 49er et de 49er FX. « J’ai eu la chance de rencontrer les bonnes personnes qui m’ont rappelée pour les Championnats du Monde de J80, la Normandy Channel Race ou encore la Transat Jacques Vabre », poursuit-elle.
Émilie enchaîne ensuite les expériences sur des courses et évènements nautiques côté organisation dans plusieurs domaines, dont la communication, l’organisation générale, la production ou encore l’hospitality. 2015 marque un tournant dans sa carrière quand elle rejoint la Race for Water Foundation en tant que projet manager du tour du monde en MOD 70. L’objectif : étudier la pollution plastique des océans. Sa première mission internationale sur laquelle elle gère la logistique du tour du monde, et qui lui permet « de découvrir le développement durable et les enjeux environnementaux ». Des problématiques cruciales qui la passionnent et qui joueront plus tard un rôle central dans sa carrière. Et une expérience qui reste l’un de ses meilleurs souvenirs professionnels à ce jour. « C’est celle qui m’a fait le plus grandir et qui m’a permis de me rendre compte des enjeux environnementaux et de la pollution des océans ».
Après une incursion dans le milieu du ballon rond lors de l’EURO 2016 de football au cours duquel elle gère le programme d’hospitalité de Continental à Marseille, un premier avant-goût de l’America’s Cup sur les Louis Vuitton America’s Cup World Series à Toulon où elle s’occupe de l’hospitalité en mer, elle travaille sur le Vendée Globe au service de presse. Manager du premier Sail Grand Prix à Marseille lors de la saison 1 de Sail GP, expérience qu’elle réitèrera par la suite à Saint-Tropez, elle rejoint l’équipe d’organisation de The Ocean Race en tant que Sustainability Event Manager. L’occasion pour elle de replacer l’environnement au centre de sa mission. Une voie qu’elle suit ensuite sur SailGP avec le programme Inspire et sur la Transat Jacques Vabre 2021. Sur The Ocean Race et SailGP, où elle fait un remplacement au sein du France SailGP Team en logistique, elle croise à plusieurs reprises la route de Bruno Dubois.
Si elle garde un pied sur le circuit SailGP avec l’Impact League, Émilie travaille désormais au sein de l’Orient Express Racing Team en tant que freelance. « Je suis rentrée au départ pour une mission sur le développement durable mais aujourd’hui, je travaille aussi sur la partie logistique avec Louis Viat, directeur des opérations. Je n’ai pas hésité car les deux sujets m’intéressent. D’ailleurs, je me suis formée entre temps pour maîtriser les outils et enjeux environnementaux, notamment en matière de bilan carbone. J’ai aussi beaucoup appris sur la manière de réduire l’impact d’un évènement au contact de ceux avec qui j’ai travaillé. »
Au sein d’Orient Express Racing Team, la mission d’Émilie consiste notamment à gérer les opérations liées à la vie de la base, son montage et sa construction, mais aussi les sujets environnementaux avec Kellie Covington avec qui elle définit les grandes lignes de la stratégie. « Je suis contente que ma mission soit hyper diversifiée et de pouvoir switcher de sujets car je n’ai pas eu l’habitude de travailler sur un seul projet », indique celle qui se réjouit de travailler au sein du team. « Je ne m’étais jamais fixé d’objectif à long terme dans ma carrière mais c’est un rêve qui se réalise malgré tout », confie Émilie, qui aime « se balader sur la plage et être dans la nature » quand elle ne travaille pas. En revanche, elle ne fait plus de voile car elle « n’aime pas faire les choses à moitié », que son emploi du temps ne lui laisse plus le temps de faire de la compétition, et qu’elle apprécie avoir des journées off.
Son avenir professionnel, elle ne l’imagine pas sans la dimension environnementale devenue essentielle à ses yeux. Ni sans challenge. « Je veux continuer à développer compétences et à apprendre des personnes avec qui je travaille ».
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EMILIE ET L’AMERICA’S CUP
Ce que la Coupe représente pour elle : « Un peu un graal. Dans la voile, il n’y a pas grand-chose d’équivalent, c’est unique. Travailler pour un projet français est une chance inouïe. »
Un souvenir précis de l’America’s Cup : « Ce qui m’a marqué, c’est d’avoir vu des personnes de Groupama Team France pleurer en suivant les courses aux Bermudes. J’ai souvent été côté organisation et à ce moment-là, je me suis dit que ça devait faire quelque chose de faire partie d’une équipe. Cequi m’anime, c’est le côté humain, travailler avec des gens dont je partage les valeurs et de qui je peux apprendre »